Sébastien LEFAIT
Professeur à Aix-Marseille Université, directeur du Laboratoire d’Études et de Recherche sur le Monde Anglophone (LERMA UR853)
Visibilité négative et droit de regard sur les représentations urbaines (sur Baltimore et quelques autres villes malmenées par la fiction)
Dans un ouvrage sorti en 2010 et consacré à la série The Wire (HBO, 2002-08), à la création de laquelle il a participé, le journaliste et scénariste Rafael Alvarez s’exprime par litote sur sa sortie en DVD. Le coffret regroupant les cinq saisons, dit-il, ne risque pas d’être utilisé par la Chambre de Commerce pour attirer des entrepreneurs, des touristes, ou de nouveaux habitants dans la belle ville de Baltimore où se déroule intégralement The Wire. En effet, c’est peu de dire que la série dresse un portrait peu alléchant de la ville, que l’on voit en proie aux dealers, gangrenée par la corruption, et n’offrant comme perspective d’avenir à sa jeunesse qu’une éventuelle ascension sociale dans le milieu du banditisme. Les édiles successifs de la ville, à commencer par Martin O’Malley, maire de Baltimore au moment de la diffusion de la série, n’ont pas manqué de critiquer cette dernière pour la vision négative qu’elle propage. Cette réaction est aisément compréhensible, surtout à l’aune du succès planétaire d’une série du nouvel âge d’or adulée par la critique, mobilisée par les universitaires dans le cadre de leurs travaux, et souvent citée par Barack Obama comme étant sa préférée. Baltimore, connue pour sa forte population noire (plus de 60 %) et sa très haute mortalité par homicide (10 fois plus élevée que la moyenne pour les États-Unis), n’avait vraiment pas besoin du surcroît de publicité négative apportée par la série (publicité concrétisée par de mauvais jeux de mots, le surnom de la ville, Charm City devenant Harm City).
Cependant, la levée de boucliers contre cette publicité négative véhiculée par la série, qualifiée de mensongère par les maires successifs de Baltimore qui ont dû recourir à des campagnes promotionnelles pour corriger ce déficit d’image, pose question. En effet, elle consiste à prétendre exercer un droit de regard sur des représentations qui sont de toute évidence fictionnelles, et qui plus est déclarées et présentées comme telles.
C’est l’origine de ce droit de regard sur les représentations urbaines que j’essaierai de mieux cerner ici, en tentant de répondre aux questions suivantes.
- Peut-on attribuer ce droit de regard sur les représentations urbaines à une confusion du réel et du fictionnel telle que celle décrite dès 1985 par Ien Ang à propos des spectateurs de la série Dallas (qui invectivaient l’acteur Larry Hagman en le confondant avec le rôle joué dans la série, celui du méchant JR Ewing) ?
- Ce droit de regard, exercé le plus souvent par les dirigeants de la ville, correspond-il également au ressenti du grand public, qu’il vive dans la ville concernée ou non ?
- Le pouvoir de conviction indéniablement accordé à la fiction lorsqu’elle est accusée de nuire à l’image d’une ville peut-il être tourné à l’avantage de la cité représentée, et si oui, comment ?
Sébastien LEFAIT est professeur à Aix-Marseille Université. L’enjeu principal de sa recherche est d’étudier la manière dont les arts de la représentation interagissent avec les sociétés humaines. Ses travaux examinent par conséquent les zones d’interférences entre une question socioculturelle et sa mise en texte ou images, en montrant l’existence d’influences bilatérales : mise en place des sociétés de surveillance et impact sur la fiction, littérature américaine et culture visuelle contemporaine, tensions raciales et enjeux de leur représentation, paranoïa post 11 septembre et véhicules médiatiques correspondants, influence de la fiction militaire sur les conflits armés, etc. Dans ces travaux, il se concentre sur les modalités selon lesquelles l’œuvre d’art peut engager une réflexion, sans se contenter de refléter un état du réel.
Vasiliy DUBEYKOVSKIY
Expert et praticien de branding territorial en Russie, responsable de l’équipe CityBranding team
City branding. How the affection of residents for their home city can become a resource for the development of the territory
La communication sera présentée en anglais.
The city brand is interpreted as an idea that unites residents and serves as a basis for the communication of the city with the outside world. Firstly, it is a formulated idea. Secondly, this idea is meant to unite: most residents are aware of this idea, and they agree with it. Thirdly, a real brand becomes a territory brand when people exploit the idea of the city when they are interacting with the outside world. Residents are bearers of the brand. So, the brand of the city is created for its residents; tourists and investors are its secondary priority.
In his lecture, Vasiliy Dubeykovskiywill consider the following questions: Why residents are the main audience for a territorial brand? Is it even possible to manage decentralized communication? Why should cities be known?
Keywords: city branding, territory branding, brand concept decision, city/territory identity, resident’s involvement, brand acceptance, stakeholders, involvement mechanisms, communication, decentralization, bottom-up method
Vasiliy DUBEYKOVSKIY (Василий ДУБЕЙКОВСКИЙ) is an expert and practitioner in territorial branding in Russia, head of the CityBranding team.
Lecturer with the Department of Territorial Development named after V. Glazychev, Institute of Social Sciences, Russian Academy of National Economy and Public Administration (RANEPA).
Author of the books “Do as Uryupinsk”, “Brand of the city? 35 answers!”. Developer of models and methods of territorial branding. Leader of branding projects in Dobrjanka (Perm’ region), Urjupinsk (Volgograd region), Kostomukša (Karelia), Sarov (Nijnij Novgorod region), Osinnikov (Kemerovo region), Angarsk (Irkutsk region), Svijažsk and Bolgar (Tatarstan), Pavlovskij Posad (Moscow region), Nižnevartovsk (Xanty-Mansi autonomous region). Founder of the third place « Gestalt » (Urjupinsk). Resident of Kaluga, native of Ekaterinburg.